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Crédit immobilier : pourquoi il vaut mieux moduler son taux que suspendre le remboursement
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Certains particuliers, dont les revenus ont été amputés, pourraient être tentés de négocier avec leur banque un aménagement des échéances de remboursement. Il existe cependant une alternative moins onéreuse : la modulation.
Chômage technique pour les salariés ou employés à domicile, fermeture de restaurants, bars et de marchés pour les indépendants... Nombre de Français connaissent (ou vont connaître) avec la période de confinement une baisse sensible de leurs revenus. Parmi eux, certains avaient même contracté des dettes auprès d’une banque, dans le cadre d’un crédit à l’habitat ou à la consommation. Pour les soulager, une solution est prévue par les établissements : le report d’échéance. Plusieurs grandes enseignes nationales et mutualistes ont confirmé qu’elles appliqueront ce dispositif aux clients les plus en difficulté. Une solution utile, mais qui n’est pas indolore pour l’emprunteur.
Car en réalité, il existe deux types de reports : partiel, ou total. Alors que la version partielle permet de suspendre uniquement le paiement du capital, la totale inclut aussi les intérêts, et dans quelques rares cas l’assurance. "C’est bien le report total qui est pratiqué par l'écrasante majorité des banques", souligne Sandrine Allonier, porte-parole du courtier Vousfinancer. Selon l’établissement, l’emprunteur dispose de un à douze mois de report, mais le plus souvent, les contrats en mettent à disposition deux ou trois. Les mensualités sont ainsi décalées à la fin du prêt.
Et le particulier, en s’affranchissant du remboursement de son prêt, augmente mécaniquement le coût de son crédit. Les intérêts sont, dès lors qu’ils ne sont pas payés, considérés par la banque comme du capital restant dû. Or, si le capital augmente, les intérêts également. "Pour résumer, les intérêts génèrent à leur tour des intérêts", explique Sandrine Allonier. Une telle démarche oblige par ailleurs l'organisme à éditer un nouvel échéancier, souvent synonyme de frais d’avenant qui là encore vous seront facturés. Enfin, il convient de préciser qu’un report de 6 mois peut in fine rallonger le crédit de 8 mois, pour compenser les intérêts non remboursés Une pause de 12 mois peut même impliquer… 16 nouvelles mensualités.
Un report de 6 mois renchérit le coût du crédit de plus de 5%
Le surcoût dépend de plusieurs facteurs, et en premier lieu de l’avancement du prêt. La part des intérêts étant bien plus importante en début de prêt, l’opération sera plus coûteuse les premières années du crédit. Evidemment, plus la période de report est longue, plus la somme des intérêts non remboursées sera importante. Pour preuve, ces simulations fournies par Vousfinancer. Un couple ayant emprunté 200.000 euros sur 20 ans à 1,5% il y a deux ans et demi (janvier 2018) et s’acquittant de 965 euros de mensualités, verrait le coût de son crédit alourdi de 1.775 euros s’il venait à suspendre totalement ses remboursements pendant 6 mois à partir de mai 2020. Soit précisément une augmentation de 5,6% sur le coût du crédit initial de 31.616 euros.
Si par mesure de sécurité, le client voulait obtenir un report de 12 mois, le surcoût grimperait alors à 3.565 euros, soit 11,3% par rapport au coût du crédit de départ. Autre exemple, fourni par le courtier en assurance Magnolia, avec un prêt plus court : un emprunt de 200.000 euros sur 15 ans au taux fixe de 1,05% contracté il y a deux ans (avril 2018) . En cas de suspension des échéances 6 mois à compter du 1er mai 2020, le surcoût s'élèverait à 1.049 euros sur l’ensemble du crédit.
Au coût du crédit s’ajoute le coût de l’assurance de prêt. "Le report des remboursements ne signifie pas que le crédit s'interrompt comme le précise Astrid Cousin, porte-parole de Magnolia. Vous devez donc être protégé dans cet intervalle, car les sommes empruntées restent dues." Si l’emprunteur venait à subir un arrêt de travail, il doit être couvert, y compris lors d’une période de "pause" du remboursement. Chaque mois de report entraîne une mensualité supplémentaire sur l’assurance. Pour un cadre de bureau s’acquittant de 50 euros d’assurance chaque mois, la facture peut ainsi vite atteindre plusieurs centaines d’euros.
La modulation une solution alternative
On l'aura compris, le report de vos mensualités de crédit a un coût qui, dans certains cas, ne sera pas indolore. Ainsi, la modulation de vos échéances de remboursement peut représenter une bonne alternative. D'autant que cette solution est prévue par la quasi-totalité des contrats de prêts distribués par les établissements bancaires. Le principe : le particulier peut abaisser ses mensualités jusqu’à 30%, pour une durée minimum de douze mois. "Il est possible d’obtenir six mois, prévient Sandrine Allonier, mais il faudra négocier avec sa banque, et cela entraînera des frais d’avenant." En prenant le profil élaboré par Vousfinancer, une mensualité abaissée à 673 euros (-30%) pendant 12 mois n’entraîne qu’un rallongement de 5 mois (au lieu de 8 mois en cas de report des échéances), et un surcoût en forte diminution, à 1.040 euros. Si la négociation avec l’établissement a porté ses fruits et que le client décroche une modulation de six mois, le surcoût passe à 520 euros. Une option qui là aussi se révèle trois fois moins onéreuse que le report d'échéance. Le prêt ne sera par ailleurs prolongé que de 3 mois.
Un article de Alexandre Loukil